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Depuis
la fin de la guerre, dans les familles de ceux qui s’étaient
dressés contre l’occupant, chacun avait pris tacitement la
décision de ne plus aborder le sujet de la Résistance en
dehors parfois d’un cadre familial très restreint où
de rares amis. Aujourd’hui que le temps a fait son œuvre, que
les passions se sont apaisées, il nous a semblé important,
à nous anciens Francs Tireurs et Partisans du secteur de La-Bridoire,
d’écrire ce document afin d’honorer la mémoire
des hommes et des femmes qui, dans l’ombre, se sont battus pour
que vive la France.
Pourtant
au moment de rendre public ce document, de nombreux doutes nous assaillent.
Fallait-il vraiment reparler de cette période ? La plupart de nos
camarades résistants ont disparu en ne laissant à la postérité
que quelques brides orales de ce qu’ils avaient vécu. Dans
ces conditions vouloir rédiger une chronologie détaillée
la plus proche possible de la vérité historique relève
de la gageure.
C'est
pourquoi, nous tenons à préciser que tous les faits qui
suivent sont rapportés de mémoire et que subsistent certaines
imprécisions tant sur les faits que sur les dates. Après
tant d’années la mémoire se fait moins précise
et l’enchaînement des événements devient incertain.
Dès lors, il est difficile de retracer exactement le déroulement
des opérations, de se souvenir de qui était présent
tel jour à telle heure, de rapporter précisément
les propos, de décrire parfaitement les attitudes ou les lieux,
de commenter objectivement les décisions, de traduire véritablement
les sentiments.
Nous
prenons donc en conscience le risque de la partialité de ceux qui
ne peuvent rapporter fidèlement que la part des événements
qu’ils ont personnellement vécus, et raconter à leur
façon les descriptions et les interprétations que leurs
compagnons d’armes ont donné jadis de ces situations particulières.
Ce
document n’a donc pour seule ambition que de laisser aux futures
générations de notre commune une trace, fut-elle jugée
partielle ou partisane, de celles et ceux qui au péril de leur
vie se sont battus afin que survive un idéal de paix, de liberté
et de fraternité.
En
rendant public ce récit, nous voulons saluer la mémoire
du chef admirable que fut notre camarade Louis Martin, la mémoire
de ces hommes et femmes qui eurent de grosses responsabilités et
qui s’en montrèrent dignes en toutes occasions, la mémoire
de tous ces maquisards, de tous ces résistants jeunes ou vieux
qui surent accomplir leurs missions dans le calme, la discrétion
et l’efficacité, la mémoire de ces combattants de
l’ombre qui par leur action d’un jour ou leur engagement de
la première heure, ont construit ensemble l’Histoire de la
Résistance à La-Bridoire.
Et
que nos lecteurs ne se méprennent surtout pas sur nos intentions,
nous n’avons pas d’autre ambition que ce Devoir de
Mémoire. » |